87520
ORADOUR-SUR-GLANE



87 - ORADOUR-SUR-GLANE
Oradour-sur-Glane
Centre de la Mémoire
10 juin 1944
75 ans


2019
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Oradour-sur-Glane / Centre de la Mémoire / 70 ans

En vente

 

87520
ORADOUR-SUR-GLANE



87 - ORADOUR-SUR-GLANE
Oradour-sur-Glane
Centre de la Mémoire
70 ans


2014
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Oradour-sur-Glane / Centre de la Mémoire / 70 ans

Epuisée

 

87520
ORADOUR-SUR-GLANE



87 - ORADOUR-SUR-GLANE
Oradour-sur-Glane
Centre de la Mémoire
Le village martyr
10 juin 1944

2000 2015
2001 2016
2002 2017
2003 2018
2004  
2005  
2006 MDP  
2007  
2008 EVMe  
2009 EVM  
2010 EVM  
2011 EVM  
2012  
2013  

Oradour-sur-Glane / Centre de la Mémoire / Le village martyr

En vente

Oradour-sur-Glane est une commune française, située dans le département de la Haute-Vienne et la région Limousin. 

Le nom de la commune, dans le dialecte limousin de la langue occitane, est Orador de Glana. Les habitants sont appelés Radounauds. 

Le nom d’Oradour, qui vient du mot latin oratorium, indique qu’il y avait là, dès l’époque romaine, un oratoire, c’est-à-dire un autel et un lieu de prières pour les morts, qu’on enterrait alors au bord des routes et souvent au voisinage des carrefours. Le bourg actuel, construit après la Seconde Guerre mondiale, est situé à l'écart des ruines du village qui fut le théâtre du massacre le 10 juin 1944, perpétré par la division SS Das Reich. 

Toile de fond historique  

Avec le débarquement des Alliés en Normandie les maquis limousins multiplièrent les opérations de sabotage et de harcèlement afin de handicaper les mouvements des troupes allemandes. Ils s'attaquèrent aux garnisons, comme celle de Tulle, pour ravir le pouvoir aux structures de l'État français.

Maquis alentour et réseaux clandestins  

Oradour-sur-Glane était alors une bourgade active par ses commerces, cafés-hôtels et artisans, reliée par tramway à Limoges, distante d'une vingtaine de kilomètres (au sud-est). Toute en collines, la région est parsemée de forêts : les monts de Blond, à quelques kilomètres au nord, abritaient des maquis FTP parmi les plus anciens, dont celui du fameux Georges Guingouin, un communiste en dissidence du Parti, ainsi que la forêt de Brigueuil, à l'ouest. Quant à Saint-Junien, au sud-ouest, cette 'ville rouge' hébergeait de nombreux résistants très actifs. Dans leurs rangs se trouvaient nombre de réfugiés politiques, surtout des républicains espagnols et antifascistes italiens, qui s'étaient installés dans la région, notamment à Oradour. En ce début de juin 44, les quatre cinquièmes de ces maquis s'étaient constitués dans les douze derniers mois. Ils s'enhardirent avec le grossissement de leurs rangs. Les 8 et 9 juin, il n'y eu pas moins de cinq accrochages entre maquisards et militaires allemands, conduisant à la capture d'un officier spécialiste des blindés, Helmuth Kämpfe, et celle, non loin d'Oradour, d'un autre officier, le lieutenant Gerlach. Sans pour cela constituer un maquis, il y avait dans le bourg un noyau actif de FTP (et sympathisants) en liaison avec les maquisards, fort d'au moins une dizaine de personnes, dont trois survécurent. Plusieurs membres de la Résistance, en mission, se trouvaient à Oradour et y ont trouvé la mort, tels Albert Mirablon et Sarah Jakubowicz dont le corps, retrouvé chez l'artisan Machefer, eut droit à un cérémonial héroïque (garde d'honneur FTP, drapeau tricolore sur le cercueil...). Il existe d'autres exemples de bourgades dont la quiétude n'était pas incompatible avec la présence de réseaux de résistants, comme à Betchat, dans l'Ariège, dont la discrétion ne fut pas suffisante pour qu'ils restent inconnus des services de renseignements de la Milice ou du Sipo-SD

La division SS « Das Reich »

La Panzerdivision « Das Reich », après la bataille de Koursk où elle fut passablement étrillée, venait d'être reconstituée dans la région de Montauban, intégrant une quantité importante de nouvelles recrues, dont nombre d'Alsaciens. Alors que son équipement militaire était sévèrement protégé, les wagons plats, nécessaires pour transporter les chars, étaient sabotés par un groupe de résistants conduits par un officier britannique. Ils remplaceront la graisse des boîtes d'essieux par du sable. A la suite du débarquement, la division doit rejoindre la Normandie, les wagons ne feront que quelques kilomètres et la division devra continuer par la route. Une catastrophe pour des véhicules consommant plus d'un litre de carburant au kilomètre (char tigre). Finalement des wagons seront trouvés pour les chars en cours de route, mais les véhicules sur roues finiront par la route. Ils arriveront en Normandie avec trois semaines de retard. Harcelés par les maquis, ils sont les responsables des massacres. (D Day by S. Ambrose) 

Le groupe de reconnaissance, qui intervint le 9 à Tulle, et les deux régiments de Panzergrenadiers (infanterie portée destinée à l'accompagnement des chars) investirent la région de Limoges pour préparer le positionnement de la division dans le secteur afin de réduire les maquis. Cependant, le 8 juin au soir, cette priorité fut bouleversée par l'ordre de monter en Normandie le plus rapidement possible. 

En fin de matinée du 10, Adolf Diekmann, le commandant du 1er bataillon, choisissait la 3e compagnie (commandé par Heinz Barth) pour l'expédition qui venait d'être autorisée contre Oradour. Elle représentait environ 120 hommes, dans une dizaine d'engins semi-chenillés (SdKfz 251), chacun armé d'une mitrailleuse à l'avant, optionnellement d'une seconde, aisément démontable à l'arrière, et constituant (avec le chauffeur et le tireur) une base mobile d'appui-feu. Ce sont ces engins qui ont dû être postés en protection du village au cours de l'opération, contre une éventuelle réaction des maquis des alentours. La compagnie n'était dotée, hormis les mitrailleuses 42, d'aucun équipement lourd ou spécialisé (mortiers, canons, explosifs, lance-flammes). Les hommes étaient équipés d'armes légères et grenades. Avec un détachement de la compagnie de commandement, ce furent entre 150 et 200 hommes qui atteignirent le bourg peu avant 14 heures.

L'investissement du bourg  

Un groupe de chenillettes traversa le village, les soldats, debout, le doigt sur la gâchette, ne quittant pas des yeux portes et fenêtres. Les sections furent déposées aux accès du village aux fins de bouclage. Convoqué par le Cdt Diekmann, le maire fit appel au garde-champêtre pour ordonner aux habitants de rejoindre le Champ de Foire. Commença le rassemblement, parfois violent, des habitants, y compris ceux des hameaux alentour. Des personnes qui venaient au bourg furent refoulées, telle Mme Hyvernaud qui réitéra en vain sa tentative. Entre 130 et 150 habitants essayèrent d'échapper à la rafle, tel l'artisan cordonnier Machefer, militant communiste notoire pour son activisme, qui réussit à s'enfuir après avoir brûlé des papiers compromettants ou les quatre frères Senon qui essuyèrent le tir des soldats, ceux-ci ayant l'ordre d'abattre tout fuyard. Il fallait être particulièrement motivé pour affronter ainsi les armes allemandes, voire s'opposer à l'opération comme le suggère le rescapé Borie, un FTP :"des coups de feu claquent de partout. Je me dis : il y en a qui ne veulent pas suivre et qui engagent le combat".

Rassemblement et dispersion  

Le rassemblement des habitants au Champ de Foire achevé (vers 14h45), un des Waffen-SS alsaciens leur traduisit les propos du commandant Diekmann : "Un officier allemand a été tué à proximité et nous avons connaissance de l'existence d'un dépôt de munitions". Menace fut faite de mettre le feu aux maisons afin de faire sauter le dépôt clandestin. Devant l'absence de réaction, l'officier demanda au maire de lui désigner trente otages. Celui-ci répondit qu'il ne lui était pas possible de satisfaire une telle exigence. Il assura que les habitants du bourg n'avaient pas connaissance d'un tel dépôt et se porta garant pour eux. Le commandant lui demanda alors de le suivre. Ils disparurent dans la direction de la mairie, le temps d'un aller-retour. A proximité se trouvait le puits Picat contenant un nombre inconnu de cadavres dont l'état de décomposition témoignait de leur ancienneté et qui furent chimiquement détruits trois jours après le drame avant de combler le puits). De retour sur le Champ de Foire et "conscient de la gravité de la situation, le maire s'offrit généreusement comme otage; si sa personne ne suffisait point, il offrait aussi ses quatre fils". À cette proposition, l'officier s'esclaffa :"Beaucoup de charges", "trop de charges contre la commune pour que cinq otages fissent l'affaire". Il est environ 15 heures, les femmes et les enfants furent alors conduits dans l'église après des scènes déchirantes d'adieux : cris d'enfants, femmes en pleurs, certaines qui s'évanouirent. L'interprète réitéra la demande de dénonciation :"nous allons opérer des perquisitions. Pendant ce temps, nous allons vous rassembler dans les granges. Si vous connaissez quelques uns de ces dépôts, nous vous enjoignons de les faire connaître". Pas un homme ne bougea et ceux-ci furent alors divisés en groupes conduits dans six locaux (granges, garage, remise, chaix) gardés par deux soldats allongés derrière une mitrailleuse en batterie. Il était alors 15h30 environ.

Les mystères du tramway de Limoges  

Vers 15h40, une motrice en essai arriva à l'entrée du village avec trois employés à bord alors que passait un groupe d'hommes encadrés par quelques soldats. Ces derniers ordonnèrent aux trois de se joindre au groupe. L'un d'entre eux fut abattu et les deux autres menés à un officier qui, après vérification de leurs papiers d'identité et interrogatoire leur ordonna de rejoindre leur engin et retourner à Limoges. L'employé tué n'était pas en service, mais profitait de l'essai pour venir à Oradour rencontrer un artisan. Quatre heures plus tard, le tramway habituel de Limoges arrivait chargé d'habitants du village et des alentours comme si les deux employés s'étaient abstenus de rapporter le meurtre et ce qui se passait à Oradour. 

Dans l'église  

L'unique témoignage sur ce qui s'est passé dans l'église vient d'une femme de 47 ans, Margueritte Rouffanche. On admet que son récit constitue tout ce qu'il est possible de savoir du drame. La première personne à recueillir à l'hôpital le récit de la blessée fut Pierre Poitevin, un membre éminent des Mouvements Unis de Résistance : « Elle raconte ce qu'elle a vécu, calmement, posément, sans jamais varier ses déclarations. Si elle omet un détail et qu'on le lui rappelle, elle répond simplement oui, j'oubliais de le dire ». Le préfet de Limoges également reçut son témoignage le 13 juin, dont il fit un résumé : Les femmes et les enfants ont été enfermés dans l'église à 14 heures de l'après-midi. Elles vécurent dans l'angoisse en entendant les échos des premiers incendies et des fusillades. Vers 17 heures, des soldats allemands pénétrèrent à l'intérieur de l'église et déposèrent sur la table de communion un engin constitué par une sorte de caisse d'où s'échappaient des mèches enflammées qui, au bout d'un instant, rendirent l'atmosphère irrespirable. Personne ne voulut s'en approcher, mais elle n'explosa pas précise le récit selon P. Poitevin. Une des femmes parvint à forcer la porte de la sacristie, ce qui permit de ranimer les femmes et les enfants déjà touchés par l'asphyxie. Les soldats allemands se mirent alors à tirer par les vitraux de l'église puis ils pénétrèrent pour achever par des tirs de leurs mitraillettes les derniers survivants et, en même temps répandaient sur le sol une matière inflammable. Au moment où le témoin parvenait à se hisser jusqu'au vitrail, les cris d'une mère qui voulait lui confier son enfant attirèrent l'attention d'une sentinelle placée au dehors qui fit feu sur la fugitive et la blessa grièvement. Elle ne dut la vie qu'en simulant la mort. Ce même récit fut repris dans une note du 10 juillet adressée à la Commission d'Armistice franco-allemande de Wiesbaden par le secrétaire d'État à la défense.

Margueritte Rouffanche renouvela en novembre 1944 son témoignage aux auteurs Pauchou et Masfrand : Entassés dans le lieu saint, nous attendîmes, de plus en plus inquiets, la fin des préparatifs auxquels nous assistions. Vers 16 heures, des soldats âgés d'une vingtaine d'années placèrent dans la nef, près du chœur, une sorte de caisse assez volumineuse de laquelle dépassaient des cordons qu'ils laissèrent traîner sur le sol. Ces cordons ayant été allumés, le feu fut communiqué à l'engin dans lequel une forte explosion se produisit et d'où une épaisse fumée noire et suffocante se dégagea. Les femmes et les enfants à demi asphyxiés et hurlant d'épouvante affluèrent vers les parties de l'église où l'air était encore respirable. C'est ainsi que la porte de la sacristie fut enfoncée sous la poussée irrésistible d'un groupe épouvanté. J'y pénétrai à la suite, et, résignée, je m'assis sur une marche d'escalier. Ma fille vint m'y rejoindre. Les Allemands s'étant aperçus que cette pièce était envahie, abattirent sauvagement ceux qui venaient y chercher refuge. Ma fille fut tuée près de moi d'un coup de feu tiré de l'extérieur. Je dus la vie à l'idée de fermer les yeux et de simuler la mort. Une fusillade éclata dans l'église. Puis de la paille, des fagots, des chaises furent jetés pêle-mêle sur les corps qui gisaient sur les dalles. Ayant échappé à la tuerie et n'ayant reçu aucune blessure, je profitai d'un nuage de fumée pour me glisser derrière le maître-autel. Il existe dans cette partie de l'église trois fenêtres. Je me dirigeai vers la plus grande qui est celle du milieu et, à l'aide d'un escabeau qui servait à allumer les cierges, je tentai de l'atteindre. Je ne sais alors comment j'ai fait, mais mes forces étaient décuplées. Je me suis hissée jusqu'à elle, comme j'ai pu. Le vitrail était brisé, je me suis précipitée par l'ouverture qui s'offrait à moi. J'ai fait un saut de plus de trois mètres, puis je me suis enfuie jusqu'au jardin du presbytère. Ayant levé les yeux, je me suis aperçue que j'avais été suivie dans mon escalade par une femme qui, du haut de la fenêtre, me tendait son bébé. Elle se laissa choir près de moi. Les Allemands alertés par les cris de l'enfant nous mitraillèrent. Ma compagne et le poupon furent tués. Je fus moi-même blessée en gagnant un jardin voisin. Entre temps, un compte-rendu officiel des événements avait été rédigé par la Délégation du Gouvernement de la République française où il était dit que la caisse apportée par les Allemands avait explosé. 

Le mitraillage des hommes  

Le tir des mitrailleuses en batterie devant les lieux de rétention des hommes se déclencha vers 16 heures. Il est admis que c'est une détonation qui en fut le signal précurseur, ainsi que rapporté par le rescapé J. Darthout :"On a entendu un grand bruit à l'extérieur [de la grange], soit l'éclatement d'une grenade, soit un autre bruit produit par une arme, mais autre qu'un fusil. Et après, un cri...peut-être un ordre. Puis ils se sont mis à nous fusiller". D'autres rescapés sont plus précis, tel Maurice Beaubreuil :"J'ai nettement perçu (...) une explosion en provenance de l'église, suivie d'une forte mitraille provenant de tous les coins du bourg" ou madame Lang :"un bruit épouvantable éclate dans la direction de l'église qui était à quelques dizaines de mètres de nous. Détonations sur détonations se succèdent, suivies d'une immense clameur et de cris effrayants. Les mitrailleuses crépitent". Dans la grange Laudy, les soldats procédèrent avec négligence à l'achèvement des hommes avant d'accumuler paille et bois et d'y mettre le feu. Cinq d'entre eux purent ainsi s'échapper du local.

Un charnier au milieu des ruines 

L'expédition militaire allemande laissait derrière elle un village en ruines. Les granges et autres lieux où les hommes furent mitraillés avaient été la proie de violents incendies. Nombre de maisons n'avaient plus trace de toiture, certaines ayant même été éventrées. Idem pour l'église : voûte de la nef fracturée (elle finira par s'effondrer), vitraux et toitures disparus, y compris celle du clocher. Des deux lourdes cloches, il ne restait que des vestiges très partiels (20%) fondus, amalgamés aux pierres de la voûte sur lesquelles ils étaient tombés adjoints à des parties intactes, ce qui atteste le très bref mais excessivement intense flux de chaleur auquel elles furent soumises. La croix faîtière, sur sa fine sphère de laiton (toute cabossée) témoigne d'un sort tout à fait différent. Intactes car protégées du fait de leur emplacement, des pièces en bois et en tissus (autel, confessionnal, fleurs), informent de l'origine de ce flux (entrée de l'église) et de sa direction de propagation dans la nef. Dans ces ruines se trouvaient les restes des quelques 640 victimes. Si des 190 hommes abattus à la mitrailleuse il ne restait que des corps totalement carbonisés, c'est une vision épouvantable que durent soutenir ceux qui pénétrèrent dans l'église : « des corps à demi-calcinés, décapités, hachés, des membres épars... ». Tous les intervenants ont été bouleversés par le degré auquel nombre de corps des quelques 450 femmes et enfants avaient été mis en pièces : « çà et là des morceaux de crânes, de jambes, de bras, de thorax, un pied dans un soulier », une fragmentation matérialisant la violence d'une onde de choc. 

Une des premières personnes à pénétrer dans le village « disposant d'une culture scientifique », Jean Pallier, avait noté un autre trait : « il ne semble pas que les femmes et les enfants aient subi le même sort [que les hommes] puisque l'on a retrouvé dans l'église des corps que la mort a surpris dans une attitude normale ». 

Parmi les victimes on comptait 39 habitants du village mosellan de Charly qui avaient été déplacées dans le Sud-ouest avant la guerre à cause de l'imminence du conflit. Après la débâcle, elles n'avaient pas été autorisées à retourner chez elles par les Allemands. La Lorraine faisait partie de la zone interdite qui devait être germanisée après la victoire allemande.

Un témoin tragiquement concerné  

Ingénieur des chemins de fer, Jean Pallier remontait à Paris en passant par Oradour où sa femme et ses deux enfants avaient été mis à l'abri des bombardements alliés. À quelques kilomètres du bourg, la voiture fut stoppée par un barrage allemand. Lui et ses compagnons de voyage subirent alors un contrôle d'identité ainsi qu'un interrogatoire, et la voiture fut minutieusement fouillée. Sur ses explications, l'officier l'autorisa à poursuivre sa route. Tout près du village, il fut de nouveau arrêté au même instant qu'arrivait le tramway de Limoges. Il leur fut ordonné de se joindre aux passagers pour être conduits au PC de campagne où ils subirent à nouveau contrôle d'identité et interrogatoire. Les passagers de la région furent autorisés à rester, mais hors du bourg et les autres renvoyés à Limoges. L'ingénieur était libre et autorisé à pénétrer dans Oradour, qu'il parcourt le lendemain, après que des soldats lui aient dit que le village avait été détruit en raison des munitions et armes anglaises découvertes. Cette justification fut également rapportée par d'autres témoins.

Découvertes subséquentes d'objets allemands  

Les jours suivants, des cartes routières, bidons, poignards et équipements allemands furent trouvés dans les ruines du village. Dans un champ proche du bourg, ce furent des cartes postales (dont une datée du 2 juin) adressées en Allemagne, des lettres qui furent brûlées et une carte Michelin portant les indications de la route suivie par la section de canons d'assaut du Lt Gerlach et du bataillon Kämpfe.

Les survivants  

Une trentaine d'habitants sont répertoriés comme rescapés du drame. Parmi ces personnes, une parisienne, Mme Taillandier, présente depuis dix jours, qui fut laissée libre après contrôle d'identité et interrogatoire. Pareillement, Armand Senon, un adolescent immobilisé avec une jambe dans le plâtre, resta dans sa chambre. Autre cas de figure, celui des enfants Pinède : « Quand on a vu les Allemands arriver, mon père nous a d'abord fait sortir et nous a amenés dans le champ mitoyen. Il a entendu des coups de feu devant la maison et il y est retourné. On ne l'a plus jamais revu ». Quand les deux sœurs et frère furent découverts en fin de journée en raison du bruit fait par ce dernier, l'un des soldats, interrogé par l'aînée sur ce qu'ils devaient faire, lui fit signe de déguerpir. D'autres personnes, comme les époux Lang ou Renaud, se seraient simplement dérobées au rassemblement en restant chez elles. 

Procès  

Le 12 janvier 1953, un procès débuta contre 65 des participants à l'expédition devant le tribunal militaire de Bordeaux. Seuls 21 des accusés étaient présents, 7 Allemands et 14 Malgré-nous alsaciens. 

L'instruction avait disposé d'une durée considérable -une centaine de mois- pour collecter et coordonner le maximum d'informations pertinentes. Cependant, les observateurs n'ont pas manqué d'en relever « les incroyables lacunes ». Le président du tribunal n'avait-il pas d'ailleurs proclamé qu'il « aurait considéré comme son devoir de refaire toute l'information depuis A jusqu'à Z »? Il fallut bien constater en effet qu'aucune expertise des vestiges n'avait été faite, ni d'expertise médicale des victimes. Des témoins importants n'ont pas été sollicités, ni cités à comparaître; les survivants n'ont pas été systématiquement recherchés, certains s'étant manifestés durant le procès. Aucun effort ne fut engagé pour extrader les officiers responsables du massacre (quatre étaient toujours en vie), ni pour obtenir leur déposition. Il n'y eut aucune reconstitution sur place en vue de tester les fluctuations, les contradictions et la crédibilité des diverses déclarations de protagonistes. L'instruction fut ainsi extrêmement paresseuse. Le délai de huit années atteste des seules réticences des autorités à ce que le procès se tienne. Et c'est la pression des militants limousins, en particulier et surtout ceux du parti communiste, très puissant à l'époque, et de ses diverses organisations, qui eut raison de ces réticences. 

Le procès s'étala sur un mois. De nombreuses journées furent consacrées à détailler l'histoire personnelle de chaque accusé présent, faisant ressortir l'image de jeunes hommes pour la plupart incorporés sous la contrainte, à part un qui admis s'être engagé volontairement. Elles se poursuivirent avec de longues digressions sur la dureté de la vie quotidienne en Alsace-Lorraine occupée. Un ensemble de circonstances atténuantes était ainsi fourni à l'opinion publique. 

Par ailleurs, il se trouve que la majorité des accusés présents n'avaient pas, selon leurs dires, participé au massacre, ayant été postés à la périphérie du village. Les contradictions et invraisemblances des témoignages ne furent pas conséquemment interrogées. Le manque de curiosité du tribunal ne passa pas inaperçu (« De l'affaire (...) on sait tout...sauf le rôle joué par chacun des accusés »,, des accusés qui avaient souvent modifié leur récit entre les interrogatoires successifs réalisés de 1944 à 1946, tous les changements allant dans le sens du rapprochement avec la thèse présentée par l'accusation. Cela dénote le choix que firent les avocats d'une défense de connivence en vue d'obtenir une minimisation des peines. C'est la caractéristique habituelle d'un procès politique, ce qu'avait souligné le président du tribunal « Le véritable procès que nous jugeons ici est et demeure celui de l'hitlérisme » 

L'anomalie la plus flagrante reste cependant l'absence d'officiers, pour lesquels l'ordre de recherche ne fut lancé que le 11 février, à la fin du procès. L'ex-colonel Stahler, électricien en Autriche, n'a jamais été interrogé par les autorités françaises. Pas plus que l'ex-général Lammerding, dont l'extradition fut demandée par le tribunal le 30 janvier, laquelle s'ajoutait à celles émises plusieurs années auparavant, relativement au massacre de Tulle, et qui n'avaient donné lieu à aucune suite. Le tribunal refusa d'entendre l'ex-lieutenant colonel Weidinger, successeur de Stahler à la tête du régiment « Der Führer », qui s'était proposé à déposer devant lui, tout comme le Lt Gerlach d'ailleurs. Certes, celui-là n'était pas impliqué dans le massacre, mais il avait assisté au rapport d'opération du commandant, Diekmann. 

Le verdict fut d'une extraordinaire indulgence en regard du crime reproché. Deux accusés furent condamnés à mort, ainsi que tous les contumaces, dont l’Obersturmführer Heinz Barth. Les autres, sauf un acquittement, le furent à la prison ou aux travaux forcés. Il provoqua cependant un très vif mouvement de protestation en Alsace qui aida l'Assemblée à voter le 19 février l'amnistie des « Malgré-Nous ». Ceux-ci furent immédiatement libérés, sauf le condamné à mort. Les cinq Allemands virent leur peine réduite et furent libérés quelques mois plus tard. Les deux peines capitales furent commuées en réclusion perpétuelle en septembre 1954. Les deux hommes étaient libres en 1959. Aucun contumace ne fut inquiété. 

Le déroulement du procès et surtout la quasi-impunité accordée aux condamnés suscitèrent une profonde amertume en Limousin. 

Par la suite, aucun des accusés ayant comparu n'accepta d'être interrogé sur le drame, s'étant engagés à « garder un silence absolu » contre leur libération. La presse communiste a dénoncé un accord de non-application des peines entre les chefs d'État français et allemand fait au nom de la réconciliation et du réarmement de l'Allemagne face au bloc soviétique. 

Les archives relatives à ce procès ne seront rendues publiques qu'en 2053.

 

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